J'ai élagué le texte de Gogol, en ce qu'il pouvait avoir de plus abscons et de symbolique, pour qu'il soit accessible à tout public à partir de huit ans ; et en essayant de ne pas perdre la saveur du texte initial qui doit, et c'est ce que j'ai mis en avant, rester un récit fantaisiste.
C'est donc en un voyage au pays de l'absurde et du fantasmagorique que nous convions les enfants ( et ceux qui ont décidé de le rester ), par l'intermédiaire de ce conte drolatique, où nous narrons l'histoire tragi-comique de Kovaliov ; ce sieur, un beau matin, se rend compte qu'il a perdu son nez, et du fait de cette perte, en vit des mésaventures extraordinaires.
Au-delà de tout un cérémonial magique, dont est pétri ce texte, il m'a aussi intéressé parce qu'il peut être une allégorie de ce que l'on appelle aujourd'hui LA DIFFERENCE. A l'heure actuelle, notre quotidien est fait de problèmes d'intégration ( je ne parle pas forcément et seulement de problématiques liés au racisme, dont les thèmes les plus évocateurs, et néanmoins les plus réducteurs, sont, aujourd'hui le port du voile ou l'anti-sémitisme, mais de l'intégration de n'importe quel individu dans n'importe quel groupe social ), et effectivement ( et c'est en cela que le récit de Gogol me semble adroitement judicieux, et je serai tenté de dire visionnaire, si je ne pensais pas que ces problèmes d'intégration ont toujours existé ) le Sieur Kovaliov, ayant perdu son nez, finit par se sentir rejeté par l'ensemble de la population, parce qu'il n'est plus dans les normes. Ce récit ne manque donc pas de références à la réalité ; et c'est bien en cela que cette parabole touche de très près à notre quotidien, et peut donc ouvrir à des multitudes de discussions et de débats ( entre enfant et enfant, entre enfant et parent, entre enfant et instituteur, entre adolescent et professeur ou animateur, et entre adulte et adulte ).
Ce texte, bien entendu, n'a pas pour objectifs de résoudre les problèmes s'il y en a, mais plutôt de les reconsidérer ; car cette fable permet d'indiquer que le problème du rejet et de l'intégration est bien plus générale qu'on ne peut le croire ; et par des moyens ludiques, burlesques et humoristiques ( puisque ici, il s'agit d'une fiction ), elle permet de saisir ce que peut être l'isolement de personnes rejetées, et les liens de l'individu à des codes pour sa participation à l'état social.